Les sirènes échouées en Sarthe
Les Sirènes Échouées en Sarthe
La Sarthe, terre de sirènes ? Que font-elles ici, si loin de leur mer d’origine ? Aux temps grecs, les sirènes ne charmaient que par leurs chants. Sortes d’oiseaux aux immenses ailes et aux grosses griffes, elles étaient fort laides !
Les Filles du Rhin, parmi lesquelles la célèbre Lorelei, auraient été en revanche d’une beauté aussi sublime que celle de leur voix. Elles chantaient en peignant leurs longues et blondes chevelures. Alors les bateliers en perdaient le contrôle des bateaux qui se fracassaient sur les rochers.
Depuis, les sirènes sont toujours filles du dieu des flots, ont visage et buste de femme, mais ont acquis corps de poisson. En figure de proue des navires, elles sont censées leur concilier les bonnes grâces des divinités nautiques. Mais elles peuvent aussi bien protéger les voyageurs ou les perdre. Ah ! le chant des sirènes !
Si les sirènes échouées dans notre région ne se ressemblent pas, toutes joues de leurs charmes.
La Sirène du Mans, Respectable et Protectrice
Sur la bien nommée place de la Sirène, on remarque évidemment la fontaine. Mais en levant les yeux vers la maison ayant appartenu à la famille Véron du Verger, enrichie dans la fabrication et le commerce de l’étamine de laine, c’est une sirène avec une date, 1765, qui retient le regard. Avec un peu plus d’attention, on voit un bateau, voiles dépliées sur une mer démontée. Ses voiles sont-elles de chanvre, source d’un fructueux commerce dans le Maine ? Le drapeau est-il d’étamine, leur spécialité ? Est-elle là pour protéger les navires des naufrages et des pirates en des temps où le commerce maritime était une véritable aventure ? Quoi qu’il en soit, les bras largement ouverts, elle n’apaise plus les flots déchaînés, mais elle veille encore.
La Sirène de La Ferté-Bernard, malicieuse et coquette
Le quartier ancien de La Ferté-Bernard possède toujours une ravissante maison Renaissance, presque adossée à l’ancienne halle : la maison de la Sirène. Les pans de bois sculptés font se côtoyer un Saint-Étienne, un pèlerin reconnaissable à sa coquille, un « fou » montrant ostensiblement son derrière, et une ravissante sirène. Qu’elle est jolie ! Un miroir à la main, elle peigne lascivement ses longs cheveux. « Miroir, miroir, dis-moi si je suis assez séduisante ? » Elle murmurait au voyageur : « Passant, tu sauras que dans cette auberge, on t’accueillera pour le gîte et le couvert, mais que tu pourras aussi y goûter d’autres plaisirs, plus doux encore »
La Sirène de Bonnétable, Noble et Légendaire
Cette fontaine-là célèbre la fée Mélusine. Épouse de Raymondin, elle aurait fait bâtir les châteaux de Lusignan et de Bonnétable. Las ! Un triste sort la condamnait chaque samedi à voir le bas de son corps devenir queue de serpent, ou de poisson, selon les versions. Surprise par son mari, et chassée du château, elle erre depuis en dehors. Et l’on dit qu’à Lusignan comme à Bonnétable, on l’entend parfois, la nuit, chanter sa détresse. Place de la Sirène, sa voix se mêle aux rumeurs du marché. Mais peut-être converse-t-elle avec sa voisine, la fée Mèlusine qui a pris, elle aussi, la forme d’une sirène au-dessus du pont-levis du château.
Extraits du livre : La Sarthe, insolite et secrète. Éditions Sutton
Date de dernière mise à jour : 15/04/2025